La guitarra flamenca de Yerai Cortés (2025)

Synopsis officiel du film

Lorsque Antón Álvarez rencontre Yerai Cortés, il est fasciné par son talent et intrigué par l'histoire de sa famille. Yerai, figure atypique du flamenco, respecté aussi bien par les gitans les plus traditionalistes que par les artistes avant-gardistes de la nouvelle vague, décide d'embarquer avec Antón pour l'enregistrement d'un album. Les chansons, empreintes d'une grande tristesse, amènent Yerai à se confronter à son passé et à explorer un secret de famille pour tenter de revivifier sa relation avec ses parents.

Notre Critique et Analyse (L'œil de l'expert MOVFLIX)

L'Expérience | Une rencontre improbable qui transcende les genres

La guitarra flamenca de Yerai Cortés naît d'une rencontre aussi improbable que féconde : celle entre Antón Álvarez, rappeur et chanteur espagnol connu sous le nom de C. Tangana, fraîchement investi dans la production audiovisuelle avec Little Spain, et Yerai Cortés, figure éminente du flamenco contemporain. Cette amitié entre deux univers musicaux a priori éloignés donne naissance à un documentaire qui a su séduire l'Académie espagnole du cinéma, remportant deux Goyas en janvier dernier : meilleur film documentaire et meilleure chanson originale.

L'expérience proposée est celle d'un film accessible et généreux, susceptible de plaire aussi bien aux connaisseurs et amateurs de flamenco qu'à ceux qui n'y connaissent rien, voire même qui n'apprécient pas ce genre musical. C'est précisément là sa force : transcender les barrières culturelles et musicales pour toucher un public large grâce à l'universalité des histoires personnelles racontées. Yerai Cortés livre des récits intimes qui inspirent sa musique, et l'on sent qu'il brûle d'envie de faire connaître ces histoires au plus grand nombre. Antón Álvarez, réalisant là son premier film, capte cette urgence narrative avec une sensibilité évidente.

Les passages de flamenco qui ponctuent le documentaire sont décrits comme très beaux, offrant des moments musicaux intenses qui constituent l'épine dorsale émotionnelle du film. La guitare de Yerai Cortés devient bien plus qu'un simple instrument : elle est le vecteur d'une mémoire, d'une identité, d'une transmission.

L'Expertise | Un film construit sur le paradoxe

Ce qui caractérise fondamentalement La guitarra flamenca de Yerai Cortés, c'est son rapport permanent au paradoxe. Le film navigue constamment entre des tensions qui, loin de l'affaiblir, constituent son identité même. On y explore la culture gitane et l'entre-deux culturel, l'intime et le rôle social, la tradition et l'ouverture au monde contemporain. Le documentaire oscille entre réalisme brut et sensiblerie assumée, entre engagement sincère pour une cause culturelle et opportunisme commercial potentiel.

La réalisation elle-même est paradoxale, tournant autour d'une forme de générosité – le désir de donner la parole à Yerai Cortés, de documenter son art et son parcours – et de narcissisme dans le même temps. On peut se demander si Antón Álvarez, en tant que réalisateur débutant issu d'un autre univers musical, ne cherche pas aussi à se mettre en scène indirectement à travers cette rencontre, à légitimer sa propre démarche artistique par cette immersion dans le flamenco.

Cette dualité traverse l'ensemble du film : veut-il célébrer une tradition séculaire ou la moderniser à travers un regard contemporain ? Cherche-t-il à préserver l'authenticité d'un art menacé ou à l'ouvrir à de nouveaux publics au risque de le dénaturer ? Cette ambivalence, plutôt que de desservir le propos, enrichit finalement le documentaire en le rendant moins univoque, plus nuancé dans son approche de la culture gitane et du flamenco.

La forme documentaire adoptée par Álvarez permet de capter ces contradictions sans les résoudre, laissant au spectateur la liberté d'interpréter ces tensions. Le film devient ainsi un espace de dialogue entre deux mondes, deux générations, deux conceptions de l'art et de son rôle social.

Verdict et Note Finale

La guitarra flamenca de Yerai Cortés est un très beau film qui réussit le pari difficile de rendre le flamenco accessible sans le trahir, de raconter une histoire personnelle tout en touchant à l'universel. Les deux Goyas remportés témoignent de la réussite de cette première réalisation d'Antón Álvarez, qui démontre une vraie sensibilité cinématographique malgré son statut de débutant derrière la caméra.

Le documentaire fonctionne admirablement bien pour ceux qui veulent découvrir l'univers du flamenco contemporain à travers le prisme d'un artiste engagé. Les passages musicaux sont magnifiques et suffisent à eux seuls à justifier le visionnage. L'histoire de Yerai Cortés, ses racines, son rapport à la tradition et à l'innovation musicale, constituent un matériau riche qui méritait effectivement d'être porté à l'écran.

Cependant, le film n'échappe pas à certaines ambiguïtés dans son propos et sa démarche. Ses paradoxes constitutifs, s'ils enrichissent la réflexion, peuvent aussi laisser une impression de flou dans les intentions du réalisateur. La frontière entre générosité et narcissisme, entre engagement sincère et opportunisme commercial, reste parfois inconfortable. On aurait aimé qu'Álvarez assume plus clairement son positionnement face à ces tensions.

Reste un documentaire musical de qualité, porté par la force de son sujet principal et par la beauté intrinsèque du flamenco. Un film qui mérite d'être vu, même – et peut-être surtout – par ceux qui pensent ne pas aimer ce genre musical. Une porte d'entrée accessible vers un univers riche et complexe, une rencontre improbable qui aura donné naissance à une œuvre sincère, imparfaite mais touchante.

Note : 3,5/5 - Un très beau documentaire musical récompensé à juste titre, qui transcende les barrières culturelles malgré quelques ambiguïtés dans sa démarche.

Où regarder La guitarra flamenca de Yerai Cortés

Canal VOD

Location: 4.99€ | Achat: 9.99€

Regarder

La bande-annonce de La guitarra flamenca de Yerai Cortés

Publié le: 1/13/2025 | Dernière mise à jour: 12/27/2025